Formation professionnelle dans la recherche et la pratique
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Enquête standardisée auprès des élèves de classes terminales d’écoles professionnelles en Suisse

Beaucoup de jeunes en formation sont satisfaits de leur école professionnelle

Comment les jeunes en formation vivent-ils le temps passé à l’école professionnelle ? L’enquête standardisée E-CT menée à l’échelle de la Suisse auprès d’élèves de classes terminales pose précisément cette question. Elle a lieu tous les trois ans et offre aux écoles participantes un aperçu de l’avis des jeunes en formation professionnelle sur la qualité de l’école et de l’enseignement. Les résultats de la dernière E-CT font ressortir que les apprentis sont dans l’ensemble très satisfaits de leur formation scolaire. Ils se montrent toutefois plus critiques en ce qui concerne la coopération entre les lieux de formation et la promotion individuelle ciblée.


Tous les trois ans, une enquête standardisée auprès des élèves de classes terminales (E-CT) est menée de façon coordonnée à l’échelle de la Suisse – dans la formation professionnelle initiale, mais également dans d’autres types d’écoles (voir encadré). Avec l’enquête auprès des jeunes en formation après deux à quatre ans d’enseignement à l’école professionnelle, les écoles obtiennent une évaluation très large et complète des aspects essentiels de la qualité de l’école et de l’enseignement du point de vue de leurs élèves sortants.

Les mandants de l’E-CT sont les cantons et/ou les écoles elles-mêmes. Les bases juridiques de la plupart des cantons suisses exigent des mesures d’assurance de la qualité des écoles. Avec l’E-CT, les cantons veillent à ce que les écoles disposent d’une base de données solide et de qualité pour l’appréciation de la qualité de leur établissement et de leur enseignement. Les écoles analysent les résultats et prennent les mesures correspondantes pour leur développement. Les résultats de l’E-CT occupent dans beaucoup de cantons une place importante dans le cadre des activités de reporting et de contrôle de gestion entre l’école et l’administration. En vue d’un meilleur aperçu d’ensemble cantonal, les cantons reçoivent à partir de cinq écoles participantes un rapport cantonal présentant les moyennes cantonales en comparaison avec les moyennes nationales.

Contenu et méthode de l’enquête

En 2019, 38 écoles professionnelles de 7 cantons avec près de 13 000 élèves ont participé à l’E-CT (N=12 941 ; CFC : N=11 661, AFP : N=1280). Elles constituent la base de la présente analyse.

Au moyen d’un questionnaire en ligne, les jeunes en formation professionnelle donnent leur avis sur divers aspects de la qualité de l’école et de l’enseignement, tels que la direction de la classe, la diversité des méthodes, l’évaluation des performances, l’encouragement et le soutien ou la coopération entre les trois lieux de formation (qualité du processus). Ils évaluent par ailleurs leur propre effort, le soutien par l’entourage social ainsi que l’expertise des enseignants (qualité de l’input) et donnent une appréciation de leur satisfaction à l’égard de l’école, de la préparation à la vie professionnelle quotidienne et de l’augmentation de leurs compétences transversales (qualité de l’output / des résultats).

Les jeunes mettent environ 20 à 30 minutes à remplir le questionnaire. Le traitement coordonné des questionnaires pendant l’enseignement assure un taux de réponse extrêmement élevé (environ 90 %) et une excellente qualité des données. Nous donnons ci-après un aperçu succinct de quelques constats importants issus de l’E-CT 2019.

Satisfaction élevée par rapport à l’école et à l’enseignement

Les enseignants font en sorte que tous puissent suivre l’enseignement dispensé, ce que confirment plus de deux tiers des élèves.

Peu avant la fin de leur dernière année (mars à mai), les jeunes en formation expriment dans l’ensemble une satisfaction élevée à l’égard de leur école : quatre sur cinq déclarent être plutôt satisfaits à très satisfaits. On constate cette satisfaction élevée sans exception dans les différents domaines de l’école : administration, matériels d’enseignement, emplois du temps, direction de l’établissement ou satisfaction par rapport aux enseignants. De même, une grande partie des jeunes se sentent dans l’ensemble bien préparés pour leur avenir professionnel (86 %), que ce soit dans les différentes disciplines (83 %, CFC seulement) ou au niveau personnel (86 %, CFC seulement).

Une direction de classe efficace est clairement et systématiquement liée au niveau de performance des classes (Helmke 2009, p.174) et constitue donc un aspect central de la qualité de l’enseignement. Les enseignants font en sorte que tous puissent suivre l’enseignement dispensé, ce que confirment plus de deux tiers des élèves (70 %, CFC seulement). Trois quarts des apprentis considèrent que les enseignants les accompagnent dans leur travail individuel de manière attentive. L’appréciation des jeunes est tout aussi favorable en ce qui concerne l’annonce des objectifs d’apprentissage en début de cours par les enseignants (82 % de réponses positives).

Ce qui manque toutefois à certains jeunes en formation, c’est le soutien individuel ciblé et l’appréciation par les enseignants. Les affirmations « Mes enseignant-e-s me complimentent quand j’ai fourni de gros efforts » et « Mes enseignant-e-s m’encouragent dans les domaines où je suis doué » ne sont vraies que pour peu d’enseignants selon un tiers des jeunes interrogés (33 % et 37 % respectivement, CFC seulement).

Coopération des trois lieux de formation

Selon Pätzold (2003), une organisation de l’apprentissage et une coopération adéquates entre les lieux de formation favorise l’atteinte d’objectifs ambitieux dans la formation professionnelle. Sans une coopération continue et constructive du personnel d’enseignement et de formation des différents lieux de formation, axée sur le lien entre la théorie et la pratique, ces objectifs ne peuvent pas être atteints. Au bout de deux à quatre ans d’expérience du système de formation en alternance, l’avis des apprentis sur la coopération entre les lieux de formation est mitigé. Pour environ un tiers des élèves, les contenus d’apprentissage de l’école et de l’entreprise, ou de l’école et des cours CIE, ne s’accordent plutôt pas. Parmi les apprentis CFC, la perception de la concordance des contenus d’apprentissage à l’école et dans l’entreprise est plus souvent défavorable (36 % d’avis négatifs) que parmi les apprentis AFC (21 % d’avis négatifs). Ces différences d’appréciation entre les apprentis CFC et AFC se retrouvent dans la totalité des résultats.

Appréciation plus favorable des apprentis AFC

Il est particulièrement notable que 45 % de tous les apprentis AFC sont très satisfaits (la meilleure appréciation possible) de leurs enseignants – contre 19 % des apprentis CFC.

Les jeunes suivant une formation professionnelle initiale de deux ans évaluent d’une manière générale tous les aspects sur lesquels porte le questionnaire plus favorablement que les jeunes suivant une formation professionnelle initiale de trois ou quatre ans. La plus grande différence apparaît au niveau de l’appréciation du soutien individuel et de l’accompagnement des travaux individuels par les enseignants, ainsi qu’au niveau de la satisfaction à l’égard des enseignants. Ces trois aspects ne sont évalués défavorablement que par une petite partie des apprentis AFC (entre 12 et 17 %). Il est particulièrement notable que 45 % de tous les apprentis AFC sont très satisfaits (la meilleure appréciation possible) de leurs enseignants – contre 19 % des apprentis CFC. Ceci témoigne de la compétence pédagogique élevée des enseignants dans la formation professionnelle initiale de deux ans, qui sont capables de bien prendre en charge les élèves et de répondre individuellement à leurs besoins. En même temps, ces résultats montrent que les conditions cadre pour une promotion individuelle sont nettement plus propices dans la formation initiale de deux ans, avec l’encadrement individuel spécialisé (EIS), que dans celle de trois ou quatre ans. Ces deux interprétations ressortent également régulièrement d’évaluations externes d’écoles professionnelles.

Résumé

L’enquête standardisée auprès d’élèves des classes terminales E-CT est le sondage périodique le plus complet au degré secondaire II (cycle de trois ans). Au niveau de l’établissement, elle permet de dresser un bilan sur la base des aspects les plus divers de la qualité de l’école et de l’enseignement ; au niveau cantonal, l’E-CT sert d’instrument pour l’assurance de la qualité et de base pour les processus de reporting et de contrôle de gestion avec les différentes écoles. Le monitorage de la formation bénéficie d’un vaste ensemble intercantonal de données, à partir de 2022 également à propos de la mutation numérique du point de vue des jeunes en formation professionnelle.

Les résultats de la dernière E-CT 2019 indiquent que les jeunes, au bout de deux à quatre ans d’expérience de l’école professionnelle, sont dans une large mesure satisfaits de leur école et de leur préparation à la vie professionnelle. Les apprentis AFC notamment se sentent encouragés et soutenus par leurs enseignants. Les aspects à améliorer sont, du point de vue d’une partie significative des élèves, la coordination des contenus d’apprentissage entre les trois lieux de formation – l’école professionnelle, l’entreprise et les cours interentreprises – et, du point de vue des apprentis CFC, l’encouragement individuel ciblé et l’appréciation de la part des enseignants.

Indications complémentaires à propos de l’enquête

Grâce à la réalisation simultanée de l’enquête dans toute la Suisse, on obtient un jeu de données comparatives qui permet à toute école d’évaluer ses propres résultats aussi bien par rapport à ses propres prescriptions qu’en comparaison avec d’autres écoles du même type. On distingue ici parmi les écoles du secondaire II trois types d’écoles (gymnases, écoles de culture générale, écoles de commerce et d’informatique) et dans la formation professionnelle de base cinq groupes d’élèves (CFC avec formation de trois ans, CFC avec formation de quatre ans, AFC, maturité professionnelle I et maturité professionnelle II). L’E-CT compte parmi les mesures les plus faciles d’accès et les moins coûteuses à la disposition des cantons et des écoles pour l’assurance et le développement de la qualité. Le prix est de 2750,– par école (prix unitaire dans toute la Suisse à partir de 2022).

Le sondage tient compte du fait que la complexité de la qualité de l’école et de l’enseignement ne peut pas être appréhendée par une seule théorie (cf. Helmke, 2009). La base théorique est formée par le modèle d’analyse de la qualité à trois piliers de Donabedian (1980), complété par le modèle de contrôle et d’assurance de la qualité dans les écoles et l’enseignement de Ditton (2000), et le modèle d’offre et d’utilisation de Helmke (2009) pour l’enseignement. Le modèle à trois piliers pour la qualité de l’éducation distingue trois dimensions de la qualité des écoles : qualité de l’input, qualité du processus et qualité de l’output / des résultats (par ex. Donabedian 1980 ; Ditton 2000 ; Dubs 1999). Pour une évaluation d’ensemble de la qualité de l’école, il faut tenir compte de toutes les trois dimensions et poser des questions sur des aspects appropriés à cet égard.

À partir du 1er janvier 2022, les prestations de l’IFES IPES sont mises à la disposition de toutes les écoles du secondaire II sous l’égide du ZEM CES. La prochaine E-CT aura lieu au printemps 2022 et comprendra un nouveau module du questionnaire portant sur la mutation numérique. L’IFES IPES vise à franchir le seuil de 100 écoles participantes. Plus il y aura d’écoles qui participent, plus les résultats et les comparaisons seront précieux pour tous. Renseignements et inscription : sb-admin@ifes-ipes.ch


Bibliographie

  • Ditton, H. (2000). Qualitätskontrolle und Qualitätssicherung in Schule und Unterricht. Ein Überblick zum Stand der empirischen Forschung. Zeitschrift für Pädagogik, 73-92.
  • Donabedian, A. (1980): The Definition of Quality and Approaches to Its Assessment, Explorations in Quality Assessment and Monitoring. Band 1. Health Administration Press.
  • Dubs, R. (1999). Qualitätsmanagement in Schulen. In G. Grogger & W. Specht (Hrsg.), Evaluation und Qualität im Bildungswesen. Problemanalyse und Lösungsansätze am Schnittpunkt von Wissenschaft und Bildungspolitik (80-85). Graz: Zentrum für Schulentwicklung.
  • Helmke, A. (2009): Unterrichtsqualität und Lehrerprofessionalität. Diagnose, Evaluation und Verbesserung des Unterrichts. Seelze-Velber: Kallmeyer/Klett.
  • Pätzold, G. (2003). Lernfelder – Lernortkooperationen. Neugestaltung beruflicher Bildung. Bochum: Projekt Verlag.
Citation

Müller, C., & Schorn, I. (2021). Beaucoup de jeunes en formation sont satisfaits de leur école professionnelle. Transfer. Formation professionnelle dans la recherche et la pratique 6(3).

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